Les petits billets de Letizia

Je pensais aller en boîte, mais je me suis retrouvée au spectacle de la vie. Je serais caustique et un tantinet vulgaire pour mieux faire assimiler mes propos.

Mon côté sociologue s’est éveillé quand j’ai vu une laisse et un collier pendus à une patère du vestiaire, un collier pour mec, pas pour autre animal, son nom était dessus « Pierre », je n’imagine pas que quelqu’un a pu avoir l’outrecuidance de nommer un chien ainsi – « Donne la papatte à Maman, Pierre, allez donne… », Nan… ça ne colle pas.

Invitée et emmenée par un BG nommé Éric, j’entre dans l’établissement et d’un regard en fais le tour, deux pistes de danse deux comptoirs avec chacun deux barmans distribuant tels des pantins désarticulés diverses boissons au bout de leurs tubes et d’une barmaid distribuant en se déhanchant gracieusement, d’autres boissons à la bouteille.

De l’autre côté du comptoir je ne saurais comme qualifier ces lurons, carrément scotchés au comptoir de peur qu’on leur pique la place, un verre à la main, dégustant à petites gorgées, sans que je sache trop si c’était pour avoir plus de plaisir ou pour faire durer leur verre, ils ne parlaient pratiquement pas, se contentant de mater les meufs.
En hauteur un DJ jovial, métis asiatico-je-ne-sais-quoi, avec une barbe famélique, tout de blanc vêtu qui ne vivait que pour la techno, et ça dansait… dansait… dansait… éclairage psychédélique, lumière noire, rien ni manquait, ah oui, la boule disco n’était pas là… sniff…

Vu dans l’ensemble tout semble rodé, ça flirte ici, se pelote là, drague par ailleurs, mais à y regarder de plus près, que vois-je, mon sourcil se lève (celui qui dit que je suis curieuse), dans un coin, petite distribution de cachet que la morale réprouve à trois meufs déjà excitées avant même d’en acheter qui trois secondes plus tard trépignaient des pieds en les avalant avec un verre de Vodka, elles n’étaient venues que pour ça, j’ai compris plus tard pourquoi… « ChemSex », Drogue, alcool et sexe, mode branchée venue tout droit d’Ibiza ou de Barcelone ou de Londres pour ce que j’en sais.

La scène est édifiante, imaginez, trois chiennes en chaleur et une bande de chiens qui leur tournent autour, vous me direz. C’est la nature, cependant là, ce n’est pas la nature, et dans cette bande de chiens, aucun Alpha, ni bêta d’ailleurs, rien que des omégas pathétiques qui attendent leur tour pour tremper leurs biscuits dans le pot commun et ajouter leur ingrédient personnel à la sauce commune ou refilant leur part de protéines à une végétarienne, on n’est jamais trop bon… Gentils toutous !

Ces trois meufs ont dû se taper une quarantaine de guignols, je ne sais ce qu’il se passait dans ces toilettes. Pourtant, ça défilait, elles entraient et sortaient, et semblaient aux anges, même le bel Éric s’est senti obligé de rejoindre la meute et de donner de sa personne, le con, j’avais espéré en faire mon p’ti-dej, mais je me suis moi-même opposée un droit de veto !

Finalement, arnaque flairée, je me tire, sans même avoir touché à mon verre… Sait-on jamais… Saluant mentalement au passage les mecs au comptoir qui les yeux globuleux. Comme autant de jambons faisandés accrochés à une barre semblaient attendre qu’une princesse les emporte sur son cheval blanc (un autre jour peut-être parce que ce matin, je vomirai), sans oublier ma petite pensée à celui, ou celle chargé de récurer les toilettes, au karcher et au concentré de Javel, j’imagine…

Rentré sociologue, j’en suis ressortie sociopathe et paranoïaque !

Mon seul regret, n’avoir croisé ni le fameux « Pierre » ni sa maîtresse, franchement, ça m’aurait fait plaisir.

Avouez que c’est con, se taper plein de mecs et ne se rappeler de rien le lendemain à cause des médocs, mais où est le plaisir !