Quand La Droite Joue À La Frontière : Wauquiez, Le Pen Et L’Art De Ne Pas Choisir
Petite balade sarcastique sur les chemins tortueux de la droite française en quête d’âme (ou d’électeurs)
On m’a souvent dit que la politique était une affaire de conviction. Mais en observant « le théâtre post-macronien de la droite républicaine », j’en viens à croire que c’est surtout une affaire de GPS mal réglé. Prenons Laurent Wauquiez. L’homme se veut « chef de file d’une droite forte », mais sans trop dire avec qui, ni contre quoi, ni dans quel sens. Il répète qu’il ne s’alliera « jamais avec le RN », tout en reprenant à son compte « 90 % de leur logiciel idéologique », comme l’a si finement analysé Le Monde ([Source]).
Il faut dire que l’exercice est périlleux : « parler comme Marine Le Pen sans être Marine Le Pen », c’est un peu comme vouloir faire du heavy metal avec une flûte à bec. On comprend l’intention, on apprécie la virtuosité rhétorique, mais le public hésite entre l’ironie et l’ennui. Dans le rôle du centriste modéré (ou du punching-ball idéologique, selon les jours), François Bayrou, toujours prêt à tendre la main, à condition qu’on ne la morde pas trop fort. Face à lui, Wauquiez enfile son gilet pare-balles verbal et dénonce tour à tour « l’assistanat », « l’angélisme », « le laxisme fiscal ». On attend la suite de la collection automne-hiver avec impatience.
Pendant ce temps, Bruno Retailleau, autre pilier des Républicains, peaufine sa posture d’« homme plus droit que la droite ». Il faut croire que chez LR, la compétition se fait désormais à qui aura la ligne la plus droite sur l’échiquier, même si cela signifie risquer de tomber du plateau. Pendant ce temps-là, la base électorale hésite entre abstention et vote utile pour le RN. Parce qu’après tout, « si c’est pour voter pour une copie, autant choisir l’original », comme aiment à le répéter les communicant·e·s de Marine Le Pen.
La crise identitaire de la droite est telle qu’on pourrait la croire sortie d’un séminaire de développement personnel. Elle cherche son « moi profond », mais se cogne constamment contre les murs du réel électoral. Les sondages ? Volatils. Les alliances ? Toxiques. Le discours ? Dur, mais pas trop. Et pendant ce temps, le RN s’installe confortablement dans un costume de respectabilité qu’on lui taille sur mesure en face.
Alors bien sûr, il y a la fameuse stratégie « gaullienne républicaine d’ordre » que Wauquiez agite comme un talisman. Une promesse : « parler de frontières sans sombrer dans la haine, d’autorité sans renier la démocratie, de culture sans exclusion ». Tout cela est noble. Très noble. Tellement noble qu’on en oublierait presque qu’elle n’existe qu’à l’état d’intention, sans ligne claire, ni équipe stable pour la porter.
Mais le pire, c’est peut-être que cette ambiguïté est stratégique. Le vrai projet, c’est de « rester suffisamment flou pour plaire à tout le monde et surtout ne fâcher personne ». Ce n’est plus un parti, c’est une boutique de déguisements politiques. On y vend de la fermeté, du patriotisme, un brin de souveraineté, emballé dans un joli papier « républicain » pour rassurer les modéré·e·s.
Pendant ce temps, l’Europe regarde la France glisser lentement vers une droite identitaire assumée, mais toujours niée. Bruxelles note avec intérêt cette « droitisation douce » qui ne dit pas son nom. Les électeurs, eux, risquent de trancher plus brutalement lors des prochaines échéances.
Si j’étais conseillère de Laurent Wauquiez (et heureusement, je ne le suis pas), je lui proposerais de choisir : la copie ou l’original, l’ordre ou le désordre, le centre ou la marge. Mais surtout, de parler moins fort pour se faire mieux entendre.







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