Pourquoi Repenser Notre Modèle Social Devient Une Urgence Collective
Pourquoi avons-nous le sentiment croissant que notre système social, jadis source de fierté, ne répond plus à ses promesses ? Pourquoi cette impression que la solidarité, pourtant au cœur de nos valeurs républicaines, devient floue, parfois même injuste ? Ces questions, je me les pose depuis longtemps. Et je ne suis pas la seule. Une enquête récente révèle que « 78 % des Français·e·s jugent nécessaire une réforme en profondeur de l’État-providence », et « 67 % se disent favorables à une réduction des prestations ou du nombre de bénéficiaires ». Ces chiffres ne traduisent pas un rejet du modèle, mais une fatigue, une lassitude face à sa complexité, son inefficacité perçue, voire son opacité.
En lisant ces résultats, j’ai ressenti un mélange de tristesse et de lucidité. Tristesse, parce que je suis attachée à l’idée d’un État qui protège les plus vulnérables. Lucidité, parce que je reconnais que les défis contemporains – démographiques, économiques, écologiques – exigent une transformation en profondeur. Je crois profondément en une société qui prend soin, mais je crois aussi à la responsabilité partagée, à la clarté dans les droits et les devoirs.
Une idée m’a particulièrement interpellée : celle de l’État-prévoyance. Un modèle dans lequel l’État garantirait les protections fondamentales – santé, pauvreté, accès aux soins – tout en laissant plus d’initiative à la société civile, aux individus, aux entreprises, pour compléter et personnaliser les soutiens secondaires. Cette approche ne nie pas la solidarité, elle la redessine. Elle cherche à réconcilier deux pôles parfois opposés : « l’équité et la liberté ».
J’y vois une tentative de répondre à une demande implicite : celle d’un modèle plus lisible, plus humain, plus juste. Aujourd’hui, combien d’entre nous comprennent vraiment ce qu’iels cotisent, ce qu’iels reçoivent, ce à quoi iels ont droit ? J’ai moi-même été confrontée à cette confusion, notamment lors de démarches pour aider un proche dépendant. Ce sentiment d’être seule face à une administration impersonnelle, cela crée une distance avec l’idée même de solidarité.
Et pourtant, je continue à croire qu’un contrat social est possible. Il ne s’agirait pas de démanteler ce qui a été bâti, mais de le clarifier, de le recentrer. Comme le disait Hannah Arendt, « la promesse d’un monde commun repose sur la responsabilité que chacun·e est prêt·e à prendre envers l’autre ». Cela implique une co-construction, une transparence dans les choix publics, une pédagogie politique honnête. Cela suppose aussi de faire confiance aux citoyen·ne·s pour comprendre, choisir, participer.
J’imagine une solidarité repensée, enracinée dans nos réalités actuelles : celle des jeunes qui peinent à s’insérer, des soignant·e·s épuisé·e·s, des retraité·e·s isolé·e·s, mais aussi des entrepreneurs et entrepreneuses engagé·e·s, des parents solos, des aidant·e·s. Ce tissu social-là mérite un nouveau souffle, un cadre plus souple, plus juste, plus clair.
Alors, comment engager cette transition sans générer de nouvelles fractures ? Comment faire évoluer un modèle historique sans trahir ses fondements ? Je n’ai pas de réponse unique, mais je suis convaincue qu’il est temps de poser ces questions, ensemble. Et peut-être, à travers nos voix multiples, faire émerger une vision partagée de l’avenir.
Références utilisées :






