Comprendre Les Racines D’Une Méfiance Pour Mieux Retisser Le Lien
Je me suis souvent demandé pourquoi certaines personnes, pourtant curieuses et intelligentes, finissent par rejeter la science. Cette question me touche profondément parce qu’elle dépasse les faits ou les chiffres : elle touche au lien fragile entre confiance, savoir et pouvoir. En tant que femme engagée dans une démarche de sens, je porte en moi une conviction forte : le progrès n’a de valeur que s’il est partagé, compris, discuté. C’est ce qui m’a poussée à explorer avec attention les raisons pour lesquelles tant de gens doutent aujourd’hui de ce que la science affirme.
Nous avons tendance à croire que la défiance envers la science est un phénomène récent, mais elle est en réalité enracinée dans l’histoire. Dès l’époque des Lumières, il existait déjà une tension entre rationalité scientifique et croyances établies. Aujourd’hui, cette tension persiste, amplifiée par l’ampleur des enjeux contemporains : pandémie, changement climatique, intelligence artificielle. J’ai observé autour de moi combien cette défiance s’est accentuée ces dernières années, notamment pendant la crise du Covid-19, lorsque les avis d’expert·e·s se sont contredits et que les citoyen·ne·s se sont retrouvé·e·s pris·e·s entre des injonctions contradictoires. Beaucoup ont ressenti une perte de repères, une impression d’être exclu·e·s des décisions, voire méprisé·e·s dans leurs inquiétudes.
Je ne crois pas qu’il faille condamner ce doute. Il m’apparaît même comme un signe de vitalité démocratique. Mais ce doute devient inquiétant lorsqu’il se transforme en rejet systématique, en refus d’écouter ou de comprendre. Et ce basculement ne se fait jamais au hasard. Il est influencé par des facteurs sociaux, culturels, psychologiques. Le niveau d’éducation, par exemple, joue un rôle, mais il ne suffit pas. J’ai connu des personnes diplômées, cultivées, qui doutaient sincèrement des vaccins ou de la réalité du réchauffement climatique. Ce n’était pas un manque de savoir, mais un manque de confiance. Ce manque-là naît souvent d’un sentiment d’exclusion ou de déconnexion.
À ce contexte s’ajoute une réalité que je ne peux ignorer : les mensonges et manipulations portés par certains intérêts économiques ont profondément érodé la confiance collective. Des décennies de scandales sanitaires, de falsifications d’études, de lobbying opaque ont laissé des cicatrices. Le capitalisme, dans sa forme la plus cynique, a parfois exploité le vernis scientifique pour justifier l’injustifiable. Et cela rend le doute compréhensible. Quand des vies ont été sacrifiées sur l’autel du profit, peut-on vraiment blâmer celles et ceux qui doutent ?
La politisation des discours scientifiques me semble également préoccupante. Lorsque la science devient l’outil d’un camp contre un autre, elle perd sa fonction commune. Elle n’unit plus, elle divise. On l’a vu pendant la pandémie, mais aussi dans les débats sur la transition écologique : certain·e·s voient dans la science une menace à leur mode de vie, plutôt qu’un appui pour l’avenir. Cela révèle à quel point nos convictions profondes influencent notre manière d’interpréter les faits.
Dans cette confusion, le paysage médiatique n’aide pas. L’omniprésence de figures dites « expertes » qui interviennent sans rigueur scientifique mais avec une autorité autoproclamée brouille les repères. Ce sont des figures scientifrics plus que scientifiques : rhétoriquement brillantes, mais méthodologiquement floues. Elles cherchent souvent l’effet, pas la vérité. Et cela abîme encore davantage la crédibilité du savoir. Comment distinguer un·e chercheur·se intègre d’un·e chroniqueur·se opportuniste ? Cette confusion alimente la défiance et ouvre un boulevard aux théories les plus hasardeuses.
La manière dont les individus se positionnent face à la science dépend aussi de dynamiques sociales plus invisibles. L’appartenance à un groupe, le besoin de reconnaissance, la peur d’être trompé·e… Toutes ces dimensions jouent un rôle dans la manière dont nous croyons ou doutons. Et je me rends compte combien il est essentiel, aujourd’hui, de parler non seulement de faits, mais aussi de sens, d’émotions, d’écoute. La science n’est pas qu’une affaire de données. Elle est aussi une affaire humaine.
C’est pourquoi j’ai choisi une approche basée sur l’ouverture, l’écoute et la compréhension. Je crois en une science plus humble, plus transparente, capable de dire « je ne sais pas encore », capable de reconnaître ses incertitudes. J’ai vu combien cette posture pouvait apaiser, rétablir un dialogue, réconcilier des univers. Et je suis convaincue que cela commence dans nos échanges quotidiens, dans notre manière de parler, de transmettre, de questionner.
Comme l’a écrit le sociologue Edgar Morin : « La science a besoin de conscience, comme la conscience a besoin de science ». Cette phrase me guide. Elle m’invite à ne jamais opposer rigueur et sensibilité, mais à chercher l’équilibre entre les deux. Car ce n’est qu’à cette condition que nous pourrons redonner à la science sa place : non pas au-dessus de nous, mais à nos côtés.








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