Les petits billets de Letizia

Comprendre Les Limites Imposées Par L’Éducation Pour Réenchanter Son Imagination

Il m’arrive souvent de repenser à cette époque où, enfant, je pouvais passer des heures à inventer des mondes imaginaires sans craindre le jugement. C’était un temps où l’erreur n’était pas un échec, mais une étape naturelle du jeu et de l’apprentissage. Avec les années, j’ai vu ces élans se restreindre, comme si la spontanéité avait été remplacée par un filtre invisible, forgé par les attentes et les règles. Ce filtre, ce sont nos croyances limitantes, celles qui se construisent parfois dès les premières années de notre vie.

Ces limites ne naissent pas uniquement de nos expériences personnelles ; elles se nourrissent aussi des messages implicites que nous recevons. Une remarque anodine, une mauvaise note, un modèle éducatif figé peuvent façonner notre perception de ce qui est possible ou non. Si certaines tendances peuvent être influencées par notre tempérament ou nos aptitudes naturelles, c’est surtout l’environnement familial, social et éducatif qui trace, petit à petit, les frontières de notre confiance.

Le système éducatif hérité de l’industrialisation a longtemps misé sur l’uniformité, la standardisation et l’évaluation stricte. Les enfants apprennent à craindre l’erreur, à chercher la bonne réponse plutôt qu’à explorer plusieurs pistes. Pourtant, la recherche en psychologie cognitive montre que la créativité prospère dans des contextes où l’on peut expérimenter librement, sans menace de sanction. Comme le disait Albert Einstein : « La créativité, c’est l’intelligence qui s’amuse ».

Observer les enfants dans leurs phases d’exploration est une leçon en soi. Leur curiosité ne connaît pas de hiérarchie : un insecte, une chanson inventée ou un dessin maladroit ont la même valeur d’expérimentation. Ce regard neuf est précieux. Il nous rappelle que la créativité ne se limite pas à l’art, mais qu’elle est une manière d’aborder la vie avec ouverture et flexibilité.

Pour retrouver cette dynamique, il existe des pratiques simples : renouer avec des activités où nous acceptons d’être débutant·e, rejoindre des ateliers créatifs, pratiquer la méditation pour apaiser la peur du jugement, ou encore s’impliquer dans des projets collectifs où l’expérimentation est valorisée. L’apprentissage par projet, les pédagogies actives et les espaces comme les FabLabs montrent qu’il est possible de conjuguer liberté et apprentissage structuré. Certaines méthodes populaires, comme la programmation neurolinguistique, peuvent séduire, mais méritent d’être abordées avec esprit critique et complétées par des approches validées scientifiquement.

Réfléchir à l’avenir de notre éducation est essentiel. Pour que l’école prépare réellement à une société en constante mutation, elle doit dépasser la logique de reproduction des savoirs et s’ouvrir à celle de la création. Intégrer l’art, la collaboration et la pensée critique dans les programmes n’est pas un luxe, mais une nécessité. C’est aussi un choix de société : celui de former des personnes capables d’imaginer, d’innover et de s’adapter.

Retrouver la créativité enfantine, ce n’est pas seulement retrouver le plaisir de créer ; c’est aussi réapprendre à voir le monde sans préjugés, avec curiosité et ouverture. Ce chemin demande de la patience, de la bienveillance envers soi-même et le courage de franchir les frontières que nous avons parfois intégrées sans les questionner. Et si, ensemble, nous réinventions notre manière d’apprendre et de penser ?

Références :

– IH2EF, « Pensée créative en milieu scolaire », 2024

– OCDE, « PISA 2022 Creative Thinking », 2024

– Besançon, M., Lubart, T., « La créativité, son développement et l’école », Persée, 2005