Pourquoi Les Coupes Budgétaires Mettent Les Femmes Plus En Danger
« Les arbitrages budgétaires ne sont pas neutres : ils décident qui sera protégé·e et qui sera abandonné·e ». Cette phrase résonne en moi chaque fois que j’écoute les récits de mères isolées, de soignant·e·s ou de bénévoles d’associations féministes. Dans mon quotidien, je vois se multiplier les histoires de permanences qui ferment, de lignes d’écoute saturées et de services sociaux à bout de souffle. En 2025, plus de sept associations féministes sur dix déclaraient une dégradation financière. Comment rester silencieuse face à ce qui ressemble à une austérité dirigée, où les économies tombent précisément là où travaillent et dépendent les femmes ?
Le gouvernement a choisi de réduire ses dépenses au nom du redressement des finances publiques. Mais derrière ce vocabulaire technocratique, la réalité est brutale. Les services sociaux et du soin, où l’on compte plus d’un million de travailleuses en France, sont parmi les plus touchés. Dans les métiers du social, 42 % des effectifs sont concentrés chez les aides à domicile, un secteur massivement féminisé, peu valorisé et souvent marqué par le temps partiel subi. Couper dans ces budgets, c’est non seulement fragiliser des emplois précaires mais aussi priver d’accompagnement des millions de personnes âgées, dépendantes ou en difficulté.
« Les économies ne tombent pas au hasard : elles tombent là où travaillent et dépendent les femmes ». La phrase n’est pas de moi, mais elle dit l’essentiel. Quand les subventions se réduisent, ce sont des associations locales qui ferment, souvent en milieu rural, laissant des victimes de violences sans interlocuteur·rice à proximité. Dans le domaine de la lutte contre les violences sexistes et sexuelles, les conséquences sont dramatiques : l’hébergement d’urgence se raréfie, les accompagnements psychologiques sont suspendus, les délais judiciaires s’allongent. Chaque réduction de budget accroît le risque vital pour celles et ceux qui cherchent à fuir la violence. Comme l’a écrit Simone de Beauvoir : « N’oubliez jamais qu’il suffira d’une crise politique, économique ou religieuse pour que les droits des femmes soient remis en question. Ces droits ne sont jamais acquis ».
Les responsables politiques justifient ces coupes par la dette publique, la nécessité de redresser les comptes et la contrainte européenne. Pourtant, d’autres solutions existent. De nombreux rapports officiels et universitaires rappellent que des outils comme la budgétisation sensible au genre permettent d’évaluer l’impact réel des mesures avant leur adoption. Pourquoi ne pas imposer une évaluation genrée systématique ? Pourquoi ne pas sanctuariser certains financements, comme ceux destinés à la lutte contre les violences, au lieu de les considérer comme des variables d’ajustement ? Les économistes soulignent aussi que des alternatives fiscales plus progressives pourraient générer des recettes sans sacrifier les services essentiels.
Face à ces constats, je crois qu’il est urgent d’ouvrir le débat publiquement et de refuser de considérer ces coupes comme inéluctables. Nous devons affirmer collectivement que les droits des femmes, la sécurité des victimes de violences et l’accès aux services sociaux ne sont pas négociables. Sanctuariser les budgets liés à l’égalité, renforcer les financements associatifs et imposer une transparence réelle sur l’impact genré des arbitrages budgétaires ne sont pas des options, mais des nécessités démocratiques. En agissant, nous rappelons que la justice sociale ne saurait s’arrêter aux colonnes d’un tableur, et qu’aucune ligne de budget ne doit valoir plus qu’une vie humaine.
Références principales :
– Haut-Conseil à l’égalité, « État du sexisme en France », janvier 2025.
– DREES, « Effectifs et caractéristiques des professionnelles du social », mai 2025.
– Fondation des Femmes, enquête nationale sur l’impact des coupes budgétaires, août 2025.
– Sénat, rapport sur le financement de la lutte contre les violences sexistes et sexuelles, juillet 2025.








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