Progrès Visibles, Résistances Tenaces
Il y a quelques semaines, j’ai été frappé·e par le témoignage d’une députée française racontant qu’après un débat houleux, elle avait retrouvé sa boîte mail inondée de messages haineux. Ce n’était pas seulement une attaque politique, mais une attaque dirigée contre elle en tant que femme. Ce récit m’a rappelé à quel point, malgré les avancées institutionnelles, la parité en politique demeure une conquête fragile. Aujourd’hui, la moyenne mondiale de femmes élues dans les parlements nationaux atteint à peine 27 %, et la France, après les législatives de 2024, recule avec seulement 36 % de députées. Ce paradoxe révèle une vérité dérangeante : les progrès sont tangibles, mais les résistances structurelles restent puissantes.
En Europe, les lois paritaires et les dispositifs incitatifs ont permis des avancées réelles. Je pense notamment aux élections européennes de 2024, qui ont favorisé une représentation plus équilibrée. En France, des sanctions financières existent pour les partis qui ne respectent pas la parité dans les investitures. Pourtant, ce mécanisme est souvent contourné : les femmes sont fréquemment placées dans des circonscriptions « ingagnables ». La diplomatie féministe, que la France entend promouvoir à travers une stratégie 2025–2030, cherche à internationaliser ce combat. Elle porte un message clair : l’égalité n’est pas seulement un enjeu national, mais aussi une responsabilité globale.
Cependant, l’obstacle le plus dur à franchir reste socioculturel. Les élues et candidates font face à une double charge : assumer les responsabilités familiales tout en affrontant un univers politique façonné par des codes masculins. Les chiffres du temps partiel confirment cette asymétrie : près d’une femme active sur quatre est en emploi partiel, contre moins d’un homme sur dix. À cela s’ajoutent les violences sexistes, physiques ou numériques, qui poussent certaines à renoncer à leur engagement. Le Parlement, censé incarner la démocratie, devient parfois le théâtre d’agressions verbales ou de moqueries sexistes. Comme l’écrivait Simone de Beauvoir, « il suffira d’une crise politique, économique ou religieuse pour que les droits des femmes soient remis en question ». Ces mots résonnent tristement en 2025.
Face à ce constat, je crois qu’il est urgent d’articuler des solutions concrètes. Il faut renforcer les sanctions contre les partis qui contournent la parité, mais aussi instaurer un accompagnement logistique pour faciliter l’exercice du mandat : garde d’enfants, horaires adaptés, soutien psychologique. La protection contre les violences doit devenir un pilier incontournable : cellules d’écoute, procédures disciplinaires rapides, accompagnement juridique. Enfin, les médias ont une responsabilité majeure : donner la parole aux femmes, non pas en tant que curiosités politiques, mais en tant que leaders à part entière.
L’avenir de la démocratie européenne dépend de cette bataille. Si nous échouons à garantir une réelle égalité, nous acceptons une représentation amputée de la moitié de l’humanité. Mais si nous parvenons à franchir ce cap, alors nous ouvrirons la voie à une politique plus inclusive, plus riche, plus fidèle à la diversité des citoyen·ne·s. La diplomatie féministe française, en se projetant à l’échelle internationale, peut être l’un des leviers majeurs pour inspirer ce changement.
Je veux croire que les résistances, aussi solides soient-elles, finiront par céder sous la pression combinée de la société civile, des institutions et de la détermination des femmes elles-mêmes. Car la parité n’est pas un supplément d’âme : elle est la condition même d’une démocratie vivante.
Références principales :
– Inter-Parliamentary Union, « Women in parliament 1995-2025 », 6 mars 2025
– Le Monde, « Comment la parité a reculé à l’Assemblée nationale », 18 août 2024
– Ministère de l’Europe et des Affaires étrangères, « Stratégie internationale pour une diplomatie féministe 2025-2030 », 7 mars 2025
– Haut Conseil à l’Égalité entre les femmes et les hommes, « Rapport sur l’état du sexisme en France », 22 janvier 2025








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