Les petits billets de Letizia

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Je ne peux rien enseigner à personne, Je ne peux que les faire réfléchir. (Socrate 470/399 A.JC)

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Applications De Rencontre : Faut-Il Mentir Pour Aimer ?

Applications De Rencontre : Faut-Il Mentir Pour Aimer ?

Quand la sincérité se fait swipe à gauche

Chronique d’une ère où l’honnêteté est devenue… optionnelle

Ah, les applications de rencontre ! Ces merveilles technologiques qui ont eu la brillante idée de transformer l’amour en un marché de profils soigneusement calibrés, d’avatars souriants et de descriptions plus polies que sincères. « Cher·e inconnu·e, je suis spontané·e, drôle, et j’adore les couchers de soleil » : une phrase d’une originalité si saisissante qu’elle semble écrite par le même algorithme que celle du profil suivant.

(Ironie du sort : c’est probablement vrai.)

On pourrait croire que ces outils nés pour rapprocher les êtres nous inviteraient à davantage d’authenticité. Mais non, leur vraie prouesse est ailleurs : elles ont réussi à faire du mensonge un sport de contact… virtuel. Et quel sport ! Un quart des utilisateurs admettent embellir la vérité, tandis que d’autres, plus ambitieux·ses, en redéfinissent carrément les contours. « Ce n’est pas mentir, c’est juste… arranger la réalité », expliquent-ils avec une candeur touchante.

(Comme si Photoshop était une forme de poésie moderne.)

Le plus beau, c’est cette créativité débordante : âge révisé, profession optimisée, hobbies soudainement élargis aux randonnées himalayennes. L’humain 2.0 n’a plus besoin de vivre une expérience ; il lui suffit de la décrire avec conviction. Et c’est là que réside tout le génie de ces plateformes : encourager chacun·e à devenir scénariste de sa propre vie amoureuse, version « director’s cut ».

Mais qu’on se rassure : ces mensonges ne naissent pas d’un vice, non. Ils sont le fruit d’une noble cause : la peur du rejet, cette antique émotion qui, transposée à l’ère numérique, justifie tout. Après tout, pourquoi risquer d’être soi-même quand un simple filtre peut suffire ? Un philosophe contemporain, dont le pseudo doit sûrement commencer par @, aurait dit : « La sincérité est une option dans les paramètres ».

(Certain·e·s préfèrent manifestement cocher « non ».)

Et pendant ce temps, la confiance – cet ancêtre des relations humaines – tente péniblement de survivre. 77 % des utilisateurs affirment qu’ils doutent désormais de ce qu’ils voient en ligne. Quelle surprise ! Comment ne pas se sentir rassuré·e quand, sous chaque sourire, plane la possibilité d’un chatbot déguisé en âme sœur ? « L’amour, c’est la rencontre de deux mensonges compatibles », aurait pu écrire Oscar Wilde s’il avait eu un compte Tinder.

Pourtant, le génie des plateformes réside dans leur calme impassibilité. Elles observent nos illusions, les mesurent, les monétisent, puis proposent, avec une sollicitude exquise, des abonnements « Premium » pour « vérifier les profils ». Admirable cohérence : elles vendent le remède au mal qu’elles entretiennent.

(Une économie circulaire de la désillusion, en somme.)

Certains imaginent des solutions : vérifications d’identité, labels de transparence, chartes de bonne foi. D’autres préfèrent l’IA, ce nouveau Cupidon digital censé détecter les mensonges à notre place. Il fallait y penser : déléguer la confiance à une machine ! « Quand la technologie résout le problème qu’elle a créé, c’est qu’elle a enfin compris sa mission », dirait sans doute un marketeur inspiré.

Alors, faut-il mentir pour aimer ? Peut-être. Dans un monde où l’apparence prime sur l’essence, il semble presque grossier d’être honnête. Pourtant, j’ose croire qu’entre deux profils filtrés, il reste une place pour une étincelle sincère – ou, du moins, un mensonge bien intentionné. Après tout, comme le disait joliment Milan Kundera : « Le mensonge est l’expression de l’espérance ». Et en matière d’amour numérique, il semble que nous soyons plein·e·s d’espérance.

(Ou désespérément plein·e·s.)

Références principales :

  1. Étude Happn sur les comportements en ligne, 2021
  2. Enquête Norton/McAfee sur la confiance numérique, 2025
  3. Analyse Pew Research sur les usages de la séduction en ligne, 2020
  4. Article Le Monde sur les paradoxes des plateformes amoureuses, 2025

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